Encore un autre. Il soupirait longuement, reposant sa cigarette contre le rebord du cendrier. Le salon, complètement saturé de fumée, était l’endroit où il travaillait la plus grande partie du temps. Les enfants savaient qu’ils devaient le laisser tranquille du moment où l’homme d’affaire entrait dans cet endroit qui leur était strictement interdit. Avec le temps, Quincy avait apprit à respecter les ordres de son père. Étant le plus aîné d’une famille de quatre garçons, il avait toujours été en charge de ses petits frères, bien que les nounous faisaient une bonne partie du travail. Il avait toujours été celui sur qui la pression était mise. Fais-ci, fais ça. Non, pas comme ça. « Tu es l’honneur de notre famille, Quincy, ne me déçoit pas. » Son éducation fut donc toujours très stricte, formant un caractère froid et distant chez l’aîné de la famille Bang. Bien vite, il laissa tomber ses responsabilités familiales pour se concentrer sur son cercle d’amis qui, bien entendu, avait plus d’importance que tout le reste. Être le chef de la bande avait quelque chose de valorisant. Le plaisir ne dure toutefois pas indéfiniment.

Lorsque la compagnie de son père fit fortune, celui-ci le força à revenir à la maison. Engager des professeurs pour qu’ils viennent à la maison afin d’éduquer son aîné, ce n’était pas un problème. Tant qu’il le savait à la maison, en sécurité et loin de toute cette mauvaise influence, ça lui convenait. Il avait vu son garder changer d’attitude. Il l’avait vu devenir moins obéissant. Il avait su qu’il s’était battu à maintes reprises, qu’il s’amusait à intimider les plus jeunes pour avoir ce qu’il voulait. Le jeune homme avait beau avoir des coffres d’argent pleins à craquer, avoir les moyens d’acheter tout ce qu’il voulait, il préférait utiliser la force brute pour arriver à ses fins. C’est en le coupant ainsi du monde extérieur que son père le força, avec beaucoup de mal, à revenir sur le droit chemin. Quincy trouva toutefois le moyen de s’échapper, en pleine nuit, par la fenêtre de sa chambre. En ayant d’excellentes notes et en agissant normalement face à son paternel, celui-ci ne se douta de rien.

Quincy entra finalement à l’université dans un cursus qui ne l’intéressait pas vraiment. Le droit international, pour lui, ça n’avait pas plus de valeur qu’autre chose. Il ne se forçait donc pas en cours, ne se présentait pas la moitié du temps, mais prenait toutefois le temps de lire ses manuels pour être apte à passer les examens, s’en sortant très bien. Ses mauvaises relations sont toujours présentes – d’ailleurs, son cercle d’amis se compose de personnes peu fréquentables. Il ne fréquente pas nécessairement les bons établissements, mais tant que son père ou ses frères ne savent rien, il s’en contre fout. Si son père ne remarque pas ses dépenses fréquentes, ça aussi, ça l’arrange pleinement. Ils ont toujours tenté de lui mettre des rennes, de le dompter. Ils vont finir par voir que même en cage, limité, le félin reste sauvage.