« Dis moi merci. »
sun nam ji
Il y a des gosses, comme ça, qui ont pas de chance, qui commencent leur vie dans la merde dès le début. Ça craint, ce genre de vie. Vous venez au monde dans un contexte familial de merde, et la seule chose que vous pouvez faire, c’est serrer les dents et pleurer. On t’a dit, quand t’étais tout petit que tu étais le rayon de soleil de tes parents, que t’étais le petit bout qui les gardait ensemble. Tes deux pères t’aimaient, te choyaient, et faisais tout pour que t’es une vie décente, mais ça, c’était la façade d’un tableau crasseux en profondeur. Tu voyais pas les disputes, les coups, les problèmes qui s’accumulaient quand toi t’étais dans ton lit, avec ta girafe en peluche et ta veilleuse en forme d’étoile. Tu voyais pas toute la crasse qui était derrière, toute cette merde qui s’accumulait comme des dossiers sur un bureau. Tu voyais juste les hématomes de ton père, celui qui s’occupait de toi toute la journée pendant que l’autre allait travailler, et toi tu te disais que c’était parce qu’il se faisait mal en jardinant ou ce genre de choses. Mais t’as compris, un jour, t’as compris que tout n’était pas aussi beau que tu le pensais, que tu le voyais.
« Mate une dernière fois mon derrière, il est à côté de mes valises. »
Le jour où tu as vu ton père, avec ses valises, sur le pas de la porte, les larmes aux yeux. Il était tard, et t’aurais dû être dans ton lit, mais non, tu t’étais réveillé, et tu étais resté caché entre les barreaux de l’escalier. Tu pensais que c’était pas vrai, que c’était juste des vacances que ton père prenait. Et là, tu as vu le coup partir, ton père, celui qui travaillait, frappa celui qui restait et s’occupait de toi. Tu les a vu s’engueuler comme jamais, tu as vu ton père, celui que tu aimais plus que tout, prendre ses valises, et quitter la maison. Tu es resté pétrifié, tes petites mains attachées aux barreaux. Merde quoi, t’avais juste cinq ans. Ton autre père s’est retourné dans l’idée d’aller se saouler dans le salon, il t’a vu. Et t’as su que ça allait mal finir pour toi, tu ressemblais trop à ton autre père, et ça le rendait fou. Il t’a hurlé de retourner te coucher, et t’y ai aller. T’avais peur, tu voulais pleurer, mais tu serrais les dents, et fermais les yeux. T’as pas dormi cette nuit là, t’es resté couché à fixer la porte dans l’espoir de voir ton père revenir pour te souhaiter bonne nuit, mais il est jamais venu, il est jamais revenu. Il t’a abandonné, il t’a laissé dans ce taudis de la ville moyenne, il t’a laissé, il t’a abandonné et tu l’as toujours mal vécu. Les nuits se sont succédées, et tu avais de plus en plus peur, notamment quand t’entendais ton père balancer les vases contre les murs en plein milieu de la nuit.
« Quoi toi aussi tu veux finir maintenant? C’est le monde à l’envers. »
Et tu es descendu un soir. Mais petit prince, t’aurais mieux fait de rester dans ton lit, et de chialer seul. T’avais ta girafe dans la main, et tu pleurais. Un cauchemar, pauvre petit prince. Ton père t’a regardé, et tu as senti, tu as senti la haine, la colère, le déni, la dépression, tout ses sentiments que tu comprenais pas à l’époque. Il t’a pris par la main, il t’a tiré jusqu’à la cave, et il t’a poussé. Il était ivre, ivre de rage, ivre d’alcool. Tu es tombé contre un vieux sommier tout moche, tout dégarnit qui puait la pourriture. Tu pleurais encore plus, mon pauvre petit prince. Tu serrais ta peluche de girafe entre tes bras, tu t'y accrochais comme un noyé s'accroche à sa bouée de sauvetage. tu priais pour que ton père ne te fasse rien, mais tu savais que c'était trop tard. La baffe partie, et une autre, et une autre, et tu te retrouvas couvert d'hématome, couché contre le sommier puant, et tes pleures redoublaient. Ton père t'arracha ta petite girafe et te fusilla des yeux comme si tu étais une merde puante, et il quitta la cave, sans rien dire de plus. Il marmonnait des insultes tout en remontant les escaliers qui menait à la maison, et toi tu pleurais, tu t'accrochais au sommier en pleurant. Tu savais qu'à partir de ce moment, tu allais vivre un enfer.
« Tu sais la vie c'est des enfants, mais comme toujours c'est pas l'bon moment. Ah oui pour les faire, là tu es présent mais pour les élever y aura des absents. »
Tu as passé dix ans dans cette cave, à te morfondre, à pleurer, à ne prendre qu'une douche par mois. Ton père t'apportait une gamelle de nourriture tout les matins, les midis, et les soirs, t'étais devenu un pauvre chien à ses yeux, un simple petit chien qu'il devait nourrir. T'étais plus un petit prince, mon petit coeur, t'étais qu'un pauvre petit chien mal-aimé. Tu apprenais à lire, ou du moins, essayait, avec les bouquins qui traînaient dans les cartons de la cave, en cachette. Des livres que tu cachais sous le sommier pour être sûr que ton père ne le découvre pas quand il descendait pour te faire ta fête. Entre coups de poings, de pieds et attouchements plus ou même explicitement, mon pauvre petit prince, tu pleurais. Tu n'as jamais autant pleurer. Et les voisins savaient, puisqu'ils ne te voyaient plus jouer dans le jardin et qu'ils entendaient les hurlements de ton père à chaque fois que tu débattais un peu trop. Tout les soirs, tu priais, priais que ton père crève et que tu ais alors une issue pour sortir, mais chaque soir, tu te rendais compte que Dieu n'existait pas. Tu dessinais aussi, sur les murs, avec des morceaux de craies rangés dans des boîtes, ou avec des crayons de couleur cachés dans les cartons qui appartenaient à ton père disparu. Et puis un jour, ton père arrêta de venir. Tu ne l'entendais plus, tu n'entendais plus rien, tu ne le voyais plus, et tu commençais à avoir faim, à avoir soif. Et tu utilisais alors tes dernières ressources : les bouteilles qui étaient entassées dans le fond de la cave. Du vin, de l'eau, de l'alcool. Tu buvais pour étancher un peu la soif. Pauvre petit prince.
« Rendez vous au prochain règlement. »
Et puis, au bout de quelques mois de silence absolu dans la maison, tu as entendu du bruit venant d'au dessus. Des voix, plusieurs voix d'hommes, des meubles qui glissaient sur le sol d'au dessus de la cave. Et tu as alors eu une lueur d'espoir, tu as frappé comme un malade contre la porte de la cave, et on t'a ouvert. Un mec avait pointé un pistolet sur toi en ouvrant, et là, ce fut la débandade. Ils n'avaient jamais pensé à trouver un gosse de quinze ans dans la cave de leur nouvelle baraque. Et tu te souviens, petit prince, de qui s'étaient, ses gars de dix neuf à vingt-cinq ans? C'était ta nouvelle famille, un gang de la ville basse qui avaient réussit à s'infiltrer dans la ville moyenne, on les appelait les BlackTiger. Ils étaient six. Et c'est le plus vieux qui t'a sortit de là, qui s'est occupé de toi, il t'a nourrit, soigné, habillé, il s'est occupé de toi. Au début, tu t'es dis qu'avec eux, t'allais jamais revoir la lumière du jour, que t'allais finir crever avec une balle entre les deux yeux mais au final, non. Ils t'ont prit sous leur aile, et ils t'ont apprit les rudiments du métier. Ils t'ont forgé, ils t'ont réappris à parler à avoir confiance. Tu t'es pris d'affection pour le leader, t'es sa chose, et lui.. il est ton leader que tu aimes. Mais ça, c'était une amourette d'un ado de seize ans qui avait reposé toute sa confiance sur lui, car petit prince, quand tu l'as vu avec un autre, ça ne t'a rien fait de plus. A part peut-être une sorte de trahison car il t'avait tout offert : première fois, premier baiser, première arme, premier joint, première clope, premier tatouage et premier piercing. Il avait tout fait avec toi. Et pourtant, tu ne lui en voulais pas. Au contraire. T'es devenu un dealer du gang, et ils t'ont offert des études dans ce que t'as voulu. Toi, t'as choisi le dessin, car depuis que t'es tout petit, c'est l'une des rare choses qui t'a toujours passionné, petit prince. Petit prince qu'ils renommés
Hope parce que tu n'aimais pas ton nom, et parce que tu étais le plus jeune.
Kanh parce que c'était le nom de famille du leader.
Kanh Tiger.« tu étais formidable, j'étais fort minable, nous étions formidables. »
Le petit prince, tu ne t'es pas totalement forgé tout seul, il faut l'avouer. tu a été forgé par les membres du gang, ils t'ont façonnés à leur image. Et c'est pour ça que toi, le petit prince, tu as tendance à être impulsif, à ne pas toujours réfléchir avant de parler ou d'agir, ce qui te rend maladroit, mon petit coeur. Tu es maladroit, et tu te vexes vites. Tu es aussi sensible et susceptible qu'une fille, mais ça, tu le caches parce que tu veux que personne ne découvre tes petits points faibles, tes petites failles mon coeur. Donc, tu te la joues dur, tu es méchant et parfois même blessant, sans le vouloir, et tout le monde le sait que tu t'en veux après, mais t'as pas eu le choix. Tu es souvent intransigeant avec tes victimes ou tes clients, tu as appris à l'être, à ne pas laisser les gens s'en tirer à bon compte. Tu veux toujours ce qu'on te doit, et tu n'oublies jamais si quelqu'un a une dette envers toi, tu n'oublies jamais. T'es rancunier, et tu te laisses pas faire, t'as beau pas être fait de muscles, tu sais te défendre. Et tu le montres. Parce qu'on ne dirait pas comme ça, mais quand tu frappes, tu frappes fort et tu n'y vas pas avec le dos de la cuillère, n'est pas petit prince? Tu sais aussi que tu es un grand dormeur et que tu savoures chaque minutes de sommeil, et que la première personne qui te réveille risque sa pauvre petite vie, parce que tes yeux, ce sont des revolver. Aussi, tu es gourmand, et tu le montres bien. Dix minutes après que les courses soient faites, des paquets de gâteaux ont déjà disparus du placard, tout comme tu aimes montrer ce que tu fais, soit par des vidéos sur internet ou des tag un peu partout dans la ville. Tu marques ton territoire comme tu peux en même temps que tu montres que tu n'es plus un gosse à ton gang. Tu veux leur prouver que t'es pu le petit môme qu'ils ont trouvés dans une cave. Bien que toute ses années repassent dans tes cauchemars les plus profonds. Un traumatisme infantile, qu'ils disent. Mais ce bon fond, que tu caches, petit prince, c'est quoi?