Samedi soir, habituellement le jour où je viens prêter main forte à mes pères car l'okiya est bondée. Difficile de passer de la casquette au kimono, mais bizarrement le vêtement traditionnel japonais me sied plutôt bien et je n'ai pas perdu mes réflexes de geisha, même si ça fait un bout de temps que je ne bosse plus ici H24. Le pas léger, je vas et viens de table en table, m'assurant que les apprentis fassent correctement leur travail et qu'aucun client ne reparte mécontent d'ici. Nos habitués me connaissent, tous sans exception, car depuis tout petit j'évolue dans ce milieu et la plupart de nos clients m'ont vu grandir. Je ne couche pas, je suis le seul à ne pas le faire et ils le savent alors je peux me permettre d'être un brin plus tactile que les autres histoires des les satisfaire un minimum sans pouvoir aller plus loin. Et puis qui va me faire une remarque mh ?

j'étais un mac modèle - je n'étais pas le connard que je laissais paraître, je me souciais de la santé physique et mentale de mon poulain et voulais m'assurer de son évolution dans le milieu de la prostitution. et c'était ce pourquoi je me pointais à l'okiya ce soir. bon, d'accord, jouons franc jeu : la vraie raison de ma présence n'était autre que mon souci de l'investissement. j'avais accepté de bosser en partenariat avec eden et, aujourd'hui, je désirais qu'on obtienne des profits beaucoup plus généreux. ce sale môme était persuadé que je l'utilisais mais, sérieusement, ne gagnait-il pas mieux sa vie depuis que j'étais là ? glissant mes mains dans mes poches, j'entrais dans le bâtiment animé par des dizaines d'hommes en quête d'amusement ou de sexe. après m'être abaissé plusieurs fois pour saluer les maîtres des lieux et quelques grandes figures du business, je me rendais dans le petit salon où se rassemblait la plus grande partie des clients. ce soir, chers amis, j'acceptais de changer de rôle. je n'étais pas mason le vendeur mais mason l'acheteur. je ne comptais coucher avec personne, juste boire un peu, repérer les lieux et comprendre le fonctionnement de l'okiya dans ses moindres détails. une petite geisha, visiblement très jeune vint alors vers moi et, après m'avoir salué avec toute la grâce du monde, me guida jusqu'à une minuscule table à ras le sol. < merci. > soufflais-je, respectueux, avant de m'asseoir sur un coussin, seul.

Les éclats de voix se font de plus en plus bruyants la faute certainement au sake qui coule à flot depuis le début de soirée. Un client me le réclame alors je finis par céder et me lève après qu'un autre geisha ait fini de danser. Prenant place sur la petite scène, devant des dizaines de regards, je m'installe pendant que mes collègues demandent le silence, très vite les conversations s'interrompent. L'instrument que je choisis est le koto, une sorte de harpe que l'on pose à l'horizontal qui produit un son particulier, pas vraiment apprécié de tous d'ailleurs. Avec délicatesse, je me mets à genoux près de l'instrument et glisse mes doigts dessus, pinçant une première corde avant de débuter le morceau. La politesse veut que dans une okiya, si un geisha joue, tout le monde l'écoute, et c'est ce que le public fait. Ainsi seul le bruit de mes doigts frottant sur les cordes brise le silence, le morceau dure un peu plus de dix minutes puis s'achève sur une note que je fais durer. Applaudissements. Je me lève, souriant et m'incline en toute modestie avant de revenir parmi la foule, prenant directement place à côté d'une bouille qui m'est encore inconnue, non sans déconner, un visage pareil, je m'en serais souvenu. " Vous avez aimé ? " Je souris légèrement, me saisissant de la bouteille de sake pour remplir le verre de mon invité.

à peine venais-je de poser mes fesses sur un moelleux coussin qu'un son divin parvint à mes oreilles. fervent admirateur du japon et de ses arts, je tournais ma tête en direction de la scène ; une geisha jouait du koto et, admirablement, je dois l'avouer. je posais mes mains sur mes cuisses et fixait les doigts du jeune homme avec une certaine admiration. cela devait faire bon nombre d'années qu'il en jouait pour parvenir à un tel résultat de légèreté et de précision. chaque note était maîtrisée ; le spectacle était digne du lieu. une fois qu'il termina sa prestation, j'applaudis. il méritait bien ça. je le vis alors se diriger vers moi. est-ce qu'il allait être mon compagnon de beuverie en cette charmante soirée ? < vous avez aimé ? > derechef, j'esquissais un franc sourire. < beaucoup. > je baissais légèrement la tête afin de le remercier pour le verre de saké, respectueux. je n'étais pas forcément doué pour déclencher et alimenter les conversations mais j'étais persuadé que mon interlocuteur allait faire les efforts nécessaires pour changer ça.

Satisfait de la réponse de mon invité, je lui retourne son sourire, plus discret pour ma part et saisis le petit verre que je viens de remplir pour le lui tendre et l'inviter silencieusement à boire. " Pourtant ce n'est pas tout le monde qui apprécie le son du koto et sans vouloir vous vexer, c'est d'autant plus rare que vous semblez très jeune. " Notre clientèle se situe généralement entre 35 et 55 ans et il n'y a qu'à regarder autour de nous pour voir qu'il détonne, autant par son âge que par son charme assez incroyable. En venant presque à être troublé moi même, je me perds l'espace d'un instant à détailler son visage, essayant en vain de trouver un défaut quelque part mais non. Probablement la première fois que je rencontre un garçon aussi ... parfait. Peut être même qu'il est connu, mieux vaut ne pas se planter. " Ai-je le plaisir d'être le premier geisha à vous servir à boire ? "

je venais tout juste de prendre le verre de saké entre mes deux mains lorsqu'il me fit une remarque plutôt amusante. j'aimais le koto et j'étais jeune. deux choses qui, visiblement, n'allaient pas ensemble ou, du moins, étonnaient par leur rareté. un sourire toujours aux lèvres, je me sentais flatté. < j'aime tout ce qui touche au japon depuis que je suis môme. surtout les choses qui sont faites à la perfection. > j'avais donné une explication, assez brève, jugeant qu'il serait tout aussi bon de le flatter en retour. et puis, j'étais objectif : cette geisha maîtrisait parfaitement bien son art, il n'y avait aucune hypocrisie dans mes mots, que de la sincérité. connard ou pas, je savais reconnaître le talent et les bosseurs. < visiblement, oui. > soufflais-je, un faible sourire toujours aux lèvres, amusé par l'insistance que son regard me transmettait. quoi, était-il si perturbé que ça à l'idée d'avoir un client de moins de trente ans ce soir ? ou était-ce mon charisme légendaire qui opérait ? sûrement un peu des deux. < samuel n'est pas là ce soir ? > demandais-je au bout de plusieurs secondes, après avoir trempé mes lèvres dans l'alcool. simple question de curiosité qui risquait, pourtant, de ne pas vraiment plaire à mon hôte.

Samuel. S'il y a bien une chose que je n'aime pas - et ça, comme tous les geishas probablement - c'est les rivaux et visiblement Samuel en fait partie. Plus qu'un simple collègue il est comme un frère pour moi, mais quand il est question de clients, je ne fais pas de cadeau et apporte un soin tout particulier à me garder les plus riches, ou les plus mignons ... Sans le savoir, le jeune homme venait donc de s'inscrire sur ma liste et j'allais lui tenir compagnie cette fois, avec la ferme intention de lui faire oublier le nom de mon ami. " Il doit être probablement occupé avec un autre homme. " Mon sourire s'étire après avoir, mine de rien, placé une petite pique qui risque fortement de nuire à Samuel. Peu importe, c'est ça le monde des geishas, tous les coups sont permis comme on dit. " Ça tombe plutôt bien que vous aimez tout ce qui touche au Japon, mon père est né à Kyoto. " Ponctuant ma phrase d'un discret sourire charmeur, je remets en place un des pans de mon kimono.

< il doit être probablement occupé avec un autre homme. > ce qui était normal, techniquement, comme il avait été éduqué pour tenir compagnie aux clients de l'okiya. tenir compagnie signifiait-il qu'il couchait avec ou qu'il se contentait simplement de le divertir via une discussion passionnante ? oh, mais, si ça se trouve, il était simplement en train de travailler avec eden. ne sachant pas trop comment interpréter la phrase de la geisha, je me contentais de sourire en reprenant une gorgée d'alcool. au détail que m'apporta mon interlocuteur sur le lieu d'origine de son père, j'ouvris légèrement la bouche, surpris. < mais. tu es le fils des patrons ? > je ne connaissais personne de vraiment japonais mis à part eux dans le coin - mais peut-être que je me trompais, c'était fort probable. finissant mon verre, d'une traite, je me passais une main dans les cheveux en observant la complexité avec laquelle son kimono avait été attaché. < je m'appelle kwon mason. >

Le fils des patrons oui, bravo petit génie. Je me contente d'hocher discrètement la tête à sa question et finis par me pencher un peu en avant lorsqu'il se présente enfin. Mason, curieux comme nom bien que tout à fait charmant. " Matsui Hiro, fils du père de l'okiya Matsui donc. Hajimemashite. " Je me surprends à le regarder une nouvelle fois, quelques secondes, avant de revenir à moi poursuivant la conversation. " Si le Japon vous intéresse tant, je pourrais vous montrer quelques sabres, mon père en fait la collection. "

je me penchais à mon tour, bien élevé et respectueux, alors qu'il relevait mon nom et me donnait le sien. il était donc bel et bien le fils des propriétaires. pourquoi le faisaient-ils bosser avec les autres geishas ? vendaient-ils leur propre enfant ? enfin, c'était une façon de parler, ils, tous deux, n'étaient évidemment pas les géniteurs du petit. seul l'un d'entre eux avait donné sa semence. mais il avait formé son couple suite à ça donc l'autre homme en revenait à être sa maman/son papa. < hajimemashite. > soufflais-je, la tête toujours un peu baissée. bien, ça signifiait donc qu'il parlait japonais et que nous pourrions parler cette langue ensemble. langue que, oui, j'adorais pratiquer - mais très peu de gens pouvaient en faire de même alors je finissais par dialoguer en japonais avec moi-même. triste sort. < oh, avec plaisir. > repris-je après sa proposition, relevant le nez et lui souriant avec intérêt.

Ravi qu'il accepte ma proposition, je garde la carte des sabres pour plus tard, quand il sera temps de passer dans un endroit plus "intimiste". Je me saisis alors une fois de plus de la bouteille de saké, désirant remplir son verre à nouveau et dans un geste très sensuel, tire un peu sur ma manche pour laisser apparaître un bout de peau. Il y a des siècles cette simple vision suffisait à allumer un homme, mais de nos jours, à l'heure de l’hyper-sexualisation du corps, montrer son poignet ne signifie plus grand chose, bien que chez les geisha, ce geste reste un code de séduction. Seul nos clients les plus habitués connaissent l'importance de ce geste, mais Mason ne connait pas ce monde ... je tente quand même néanmoins, peut être le remarquera t-il de lui même. " Puis-je vous demander ce que vous faites dans la vie ? "

Puis-je vous demander ce que vous faites dans la vie ? je m'étais suffisamment renseigné sur le milieu, passionné par le japon et sa culture, pour capter son signal. je restais néanmoins insensible, bien qu'amusé, cristallisant mon sourire sur mes lèvres. tentait-il de me séduire ? tentait-il de captiver mon attention pour continuer de me verser du saké jusqu'à ce que je sois contraint de donner tous mes billets aux propriétaires ? il connaissait son métier et je sentais qu'il avait de l'expérience. les plus vieux clients, et ceux qui, du coup, étaient le plus en manque de sexe et de compagnie, devaient défaillir à la simple vue du poignet de ce jeune homme. < je serai docteur en maths et physique d'ici deux mois. > soufflais-je tout en passant une main sur ma nuque, la massant faiblement. mon petit cousin de six ans était arrivé chez moi la veille et je n'avais déjà plus de cou à force de me pencher pour le faire lâcher mes jambes - encore un môme capricieux dans le coin, à l'exception que celui-ci je l'aimais.

A sa réponse je parais surpris, écarquillant les yeux avant de reposer la bouteille de saké et de l'observer. Ce mec est-il humain ? Un sourire doux au visage, je me rassois sur mes talons, ne le quittant plus des yeux avant de souffler. " Beau, poli et intelligent, avez vous seulement un défaut ? " Je me mords la lèvre, observant la salle quelques secondes avant de poser de nouveau mes prunelles sur lui, mais nous sommes rapidement dérangés par l'un de mes collègues qui vient s'asseoir à notre table comme il est courant de le faire, un même geisha courtisant plusieurs clients dans une même soirée. Sauf qu'il n'a certainement pas compris la situation. Je pose les yeux sur lui et il suffit d'un regard pour qu'il se ravise et se lève aussi vite qu'il est arrivé, nous laissant de nouveau seuls. Là, c'est bien mieux. " Ah, j'ai trouvé, en couple sûrement ? ~ " Avoir des renseignements en toute subtilité, un art.

< beau, poli et intelligent, avez vous seulement un défaut ? > je lâchais un bref rire, flatté et caressé dans le bon sens du poil. était-il sérieux ou faisait-il tout pour me faire consommer davantage ? il est vrai que la nature m'avait bien gâté, que j'étais bien élevé et que mes capacités intellectuelles étaient indiscutables. mais il ne percevait pas encore mon côté salaud ; celui qui était vulgaire, cru et égoïste - sans doute parce que je le trouvais agréable et vraiment japonais. sourire éternellement sur les lèvres, j’accueillais la geisha d'un léger signe de tête ; mais cette dernière ne resta pas, visiblement mal à l'aise et sermonnée par son grand frère. n'acceptait-il pas la concurrence ? j'avais l'impression d'être un roi - au cœur de toute l'attention. à la question qu'il posa, je secouai négativement la tête, amusé. quelle curiosité. < non, du tout, sinon je ne serais pas là. > j'avais beau être un connard, je n'en étais pas moins loyal et fidèle avec les personnes que j'aimais.

Ses derniers mots m'arrachent un nouveau sourire avant que je ne soupire doucement " Fidèle en plus ... la liste a t-elle une fin ? " Caresser les hommes dans le sens du poil, une des premières choses qu'on apprend à un geisha. Toujours avec délicatesse et sans vulgarité aucune, je pose ma main sur sa cuisse, m'y appuyant à peine et me rapproche de mon nouveau client, murmurant au creux de son oreille. " Vous êtes mon type d'homme pour tout avouer, Mason-san " Ainsi proche de lui, je laisse mon souffle chaud se perdre dans son cou, créant une proximité supplémentaire alors que ces derniers mots je choisis de ne pas les prononcer en coréen. Voyons à quel point son japonais est bon ...

A dire vrai, moi qui rechigne souvent à travailler, je me dis que pour une fois, je ne perds pas mon temps, je passe même plutôt une bonne soirée en fait. Alors que je viens de chuchoter à l'oreille du jeune homme, mes yeux croisent accidentellement le regard mécontent de mon père. Inutile qu'il le formule avec des mots, je sais très bien à quoi il pense car je suis en théorie là pour m'occuper DES clients et non de celui ci en particulier. Mais je reste insensible à ce qu'il essaye de me faire comprendre, faisant comme si je n'avais rien vu et continuant innocemment la conversation. La remarque du jeune homme me fait doucement sourire et je me mets machinalement à réajuster son haut, concentré sur ce que je fais. " Mes parents ne me prostituent pas, vous savez. Et je ne baise pas avec les clients. " Ces mots peuvent sembler un peu crus dans la bouche d'une geisha mais je tiens à lui montrer que je suis là de mon propre chef et que je n'ai pas d'obligation. " Sauf quand ils me plaisent. " Je relève alors les yeux vers lui puis tapote son torse une fois son haut remis en place, lui offrant un joli sourire poli et délicat.

j'avais dû le blesser en sous-entendant qu'il n'était qu'une simple geisha comme les autres qui, à l'occasion, donnait ses fesses au meilleur offreur. mais visiblement, non, ce n'était pas le cas. après tout, il était le fils des proprios et avait donc ses avantages. comme celui de coucher avec qui bon lui semble. je prenais cette nouvelle donnée comme un compliment et, mes yeux noirs se posant de nouveau sur ses fins doigts qui s'occupaient de mon haut, un sourire illumina discrètement mes lèvres. < je ne voulais pas vous offenser. je pensais que tout le monde, ou disons toutes les geishas, était logé à la même enseigne. > je relevai la tête pour le regarder, agréable. après avoir soupiré, lentement, profitant de l'ambiance et, surtout, de sa compagnie, je repris d'une voix des plus calmes. < et si nous allions faire un petit tour dans le jardin ? >